Komyo-In

mercredi 27 janvier 2010

Vie et oeuvre de Kobo Daïshi (3)



ACTIVITES SOCIALES DE KUKAÏ

par le Révérend Yukai


 
Durant toute sa vie, Kûkaï œuvra pour soulager la misère du peuple. Ses qualités humaines et sa conduite exemplaire en faisait un modèle pour tous ; sa réputation de meneur d’hommes fit qu’on lui confia la reconstruction d’une digue, que les ingénieurs n’arrivaient pas à colmater. En 828, il ouvrit près du Tôji, la première école pour le peuple. C’est à cette époque qu’il composa également l’un des premiers dictionnaires du Japon. De nombreuses légendes se sont répandues dans tout le Japon, sur les miracles ou sur les exploits vertueux de Kûkaï. Après sa mort, les moines cherchaient à édifier le peuple et à répandre sa doctrine. Certains temples Shingon peuvent se prévaloir de posséder une trace visible de son passage : ici il a découvert une source, médité dans une grotte ; là, il a sculpté dans l’arbre un Bouddha, peint son image sur la soie en se regardant dans l’eau d’un lac ; réalités et légendes se mêlent étroitement mais contiennent un précieux enseignement pour comprendre sa doctrine et cerner sa personnalité. Quoi qu’il en soit, son activité sociale fut intense et certains pensent que c’est à cause de cela qu’il mourut d’épuisement à la tâche. L’empereur et les dignitaires lui demandaient souvent de prier pour leur santé, pour la protection du pays, ou encore, en période de sécheresse, pour faire venir la pluie. Partout sa réputation était grande, tant il était vénéré tant par la noblesse, le clergé et le peuple. Le plus remarquable, c’est que malgré tout ce qu’il a entrepris on ne lui connaît que peu d’ennemis de son vivant.. Sans doute parce qu’il mit en pratique cette sentence qu’il gardait toujours écrite à ses côté : "Ne jamais dire du mal de quiconque, ne jamais dire du bien de soi". Kûkaï était non seulement un grand religieux, mais un fin diplomate.

OEUVRE LITTERAIRE ET ARTISTIQUE
 
Kûkaï a donné au Japon, le génie qui allait lui permettre de se libérer du carcan culturel chinois. Il a perfectionné les connaissances nouvelles et en a retiré l’essence. C’est son œuvre qui inspira toute la civilisation japonaise. Poète, calligraphe, homme de lettres, philosophe, habile politique, cet esprit universel a laissé une littérature considérable dont les œuvres principales sont :
- 1) Benkenmitsunikyo-ron : "comparaison des Bouddhismes ésotérique et exotérique",
- 2) Sokushinjô- butsu-gui : "enseignement pour devenir Bouddha dans cette vie avec ce corps",
- 3) Joujoushin-ron : "les dix niveaux de développement de l’esprit", etc...
Il a dirigé la construction de temples, des travaux d’art ; et au Tôji, ses oeuvres par artistes interposés font partie des trésors nationaux du Japon.

Namo Daïshi Henjo Kongo

Vie et oeuvre de Kobo Daïshi (2)



 Le retour au Japon

par le Révérend Yukai


Sur l’ordre de l’empereur, il séjourna au temple de Takaosanji au Nord de Kyoto, où il commença à donner les enseignements du Shingon. Durant cette période, de graves troubles politiques secouèrent le pays, et Kûkaï fit des cérémonies pour apaiser la guerre civile. A trente six ans, il reçut la permission de l’empereur, de fonder l’école Shingon. Il en résume les points caractéristiques ainsi :
"Le Shingon est l’enseignement le plus profond et le plus élevé de toutes les écoles du Mahayana. Il se consacre a assurer la paix du pays par la prière, a sauver tous les êtres en chassant les malheurs et en apportant les bonheurs, et même les bonheurs de ce monde. Son idéal, c’est devenir Bouddha, dans cette vie, avec ce corps, ce qui signifie vivre dans la vérité". A cette période, il initia le moine Saïchô et quelques uns de ses disciples, à la cérémonie d’onction et de consécration appelée "Kanjô". Saïchô était resté seulement neuf mois en Chine et dès son retour au Japon, il fonda l’école Tendaï au mont Hieï. (La doctrine Tendaï, était un ésotérisme mêlé d’enseignements non ésotériques reposant principalement sur le Sûtra du Lotus). Il présenta aussi à l’empereur Kanmu, un recueil de ce qu’il rapportait, et son succès vint en partie du fait qu’on considéra que l’ésotérisme était une partie intégrante de sa doctrine. En fait, il n’avait pas reçu les enseignements les plus profonds et plus tard il demanda à Kûkaï de lui transmettre certains livres pour structurer sa doctrine. Celui-ci accepta, refusant seulement de lui transmettre ce qui, à ses yeux, était la pure doctrine ésotérique et qui ne devait pas être mélangé à autre chose. A la mort de Saïchô, ses disciples retournèrent en Chine pour approfondir le Mikkyô, et donnèrent ainsi sa forme définitive à l’école Tendaï, qui représente actuellement au Japon le Bouddhisme semi-ésotérique. Le Bouddhisme était représenté à la période Héian (794-1192) par les six écoles de Nara et les deux nouvelles religions : le Shingon et le Tendaï.
En 813, l’empereur Saga invita les grands maîtres des huit écoles dans son palais, pour une discussion publique des mérites respectifs de leurs doctrines. Tous sauf Kûkaï, dirent que l’état de Bouddha demandait de très nombreuses vies pour être réalisé. Kûkaï donna l’essentiel de son enseignement à cette occasion.
Dans la discussion qui l’opposa aux autres écoles, il développa la pensée du Sûtra suivant :
"L’homme doit connaître son propre cœur tel qu’il est. Celui qui connaît l’origine de son propre coeur tel qu’il est, connaît le cœur des Bouddhas. Celui qui connaît le cœur des Bouddhas peut connaître le cœur de tous les êtres. Il peut connaître la Vérité de l’Univers et devenir un avec lui. Il peut devenir Bouddha dans cette vie avec ce corps. C’est l’état ou les trois sources du karma, du corps, de la parole, et de la pensée des hommes, deviennent un avec les Trois Secrets (sanmitsu), du corps, de la parole, et du cœur du Bouddha. Si l’homme cherche la Sagesse du Bouddha, et maintient constamment sa pensée en lui, il peut réaliser rapidement l’état de Bouddha avec ce corps né de ses parents".
Devant le scepticisme des autres religieux, il fit les gestes sacrés avec les mains (Shu-In), répéta les formules sacrées (Shingon), et médita (Kannen) sur le Bouddha Grand Soleil, "Daïnitchi-Nyoraï". A la surprise de tous, il manifesta un état de Samadhi très profond, son corps devint très lumineux et prit la forme du Bouddha, assis sur un lotus à huit pétales. Tous se mirent à le prier.
Kûkaï était non seulement un grand religieux mais aussi un homme fort cultivé, enrichi par toutes les connaissances qu’il rapportait de Chine. Une amitié réciproque naquit avec le nouvel empereur Saga, qui était également un homme de lettres et un éminent calligraphe.
En 816, il reçut de l’empereur la permission de construire un monastère sur le mont Kôyasan. Il avait reconnu ce site sauvage, lorsqu’ascète errant il pérégrinait à travers le pays. Situé à 850 m d’altitude, ce plateau entouré de huit montagnes évoquait pour lui le Royaume de la Matrice, le lotus à huit pétales où siège le Bouddha. Son isolement et sa végétation magnifique en faisaient un lieu privilégié pour la méditation, mais les travaux de construction rencontraient des difficultés dues au froid, à la neige persistante et à l’éloignement de toute autre habitation. Toutefois, petit à petit, un monastère s’édifia. Le temple fut appelé le sommet de Vajra, "Kongôbuji". En 832, Kûkaï célébra la cérémonie d’offrande de 10.000 lumières pour le bonheur de tous les êtres. En 834, commença la construction du stupa principal, Daïtô, sorte de temple reliquaire, haut de cinquante mètres, contenant des statues de Bouddha, ainsi que celle du Saïtô (stupa de l’ouest). Kôbô-Daïshi ne vivra pas assez longtemps pour voir l’achèvement de tous les projets qu’il avait conçus. Mais ses disciples continueront son œuvre et actuellement le Kôyasan est le centre le plus important du Shingon, célèbre dans tout le pays et visité chaque année par des milliers de pèlerins.
En 832, l’empereur offrit à Kûkaï un des deux grands temples de la capitale, situé à l’Est de Kyoto, le Tôji. Il consacra ce temple pour la protection spirituelle du pays, et en fit le temple siège du Shingon. Là, pour la première fois, une cinquantaine de moines étudiaient exclusivement la doctrine ésotérique. En peu de temps, d’autres bâtiments s’édifièrent et la construction d’une grande pagode à cinq étages (Gojû-no-tô) s’amorça. Sous sa direction, des artistes sculptèrent des statues pour exprimer les vérités essentielles de l’ésotérisme. Parmi les vingt et un chefs-d’œuvre qu’on peut admirer aujourd’hui, tous trésors nationaux, quatorze datent de cette période. Le Tôji reste aujourd’hui un des plus grands temples du Shingon où, au début de chaque année, les principaux grands maîtres du Shingon se retrouvent, et durant une semaine pratiquent des rituels pour la protection de l’empereur, du pays et de tous les êtres.
A cinquante huit ans, il tomba malade et dût se retirer des affaires publiques. Il retourna au Kôyasan pour se soigner et s’occuper de ses disciples. Cependant il obtint la permission de prier dans un temple du palais impérial, pour la protection du pays et la santé de l’empereur. Pendant sept jours, il pratiqua du 8 au 14 Janvier 835, les cérémonies du "Mishuhô" dont la tradition est toujours maintenue par les plus grands maîtres du Shingon au Tôji. Le 21 Mars 835, âgé de soixante deux ans, il entre dans le samadhi éternel. En 921, il reçut le titre posthume de Kôbô-Daïshi, le Grand Instructeur qui a répandu la loi.
Derrière le temple d’Okuno-in à Kôyasan, se trouve son tombeau ; mais les fidèles et les moines pensent qu’il est toujours vivant et qu’il veille sur eux. Son corps qui est resté intact est dit médité en attendant la venue du prochain Bouddha Maïtreya. Malgré les siècles qui passent, il est toujours aussi aimé et présent dans les coeurs. Dans tout le Japon, des temples grands ou petits lui sont consacrés, tels ceux de Nishiaraï-Daïshi, Kawasaki-Daïshi près de Tokyo où toute la journée on lui rend un culte, et durant les rituels de feu, on invoque son nom pour qu’il exauce les prières. Un des lieux où on le prie le plus, est certainement son île natale de Shikoku. Un pèlerinage circulaire lui est consacré, quatre vingt huit temples principaux et vingt secondaires se répartissent comme les grains d’un chapelet sur la périphérie de l’île, atteignant ainsi le chiffre symbolique de 108. Chaque année, des millions de japonais s’y rendent pour prier et bénéficier de la grâce des Bouddhas, mais aussi car c’est un moyen incomparable pour se préparer à la mort et renaître au paradis près du Saint.

Namo Daïshi Henjo Kongo !

Vie et oeuvre de Kobo Daïshi (1)

« Les shingons sont les prières symbolisant l’illumination intérieure des Bouddhas, qui dépassent la compréhension des hommes. C’est pourquoi méditer profondément et répéter sincèrement les shingons aide à dissiper l’ignorance en nous. Chaque mot d’un shingon contient une multitude de vérités grâce auxquelles nous pouvons devenir Bouddha dans cette vie avec ce corps ».


par le Révérend Yukai

Kôbô-Daïshi est le saint fondateur du Shingon, mais il est aussi une figure marquante de l’histoire du Japon ; son esprit universel a fortement influencé la culture et la civilisation japonaises. Il était non seulement un grand religieux, mais aussi un éminent homme de lettres, un philosophe, poète et calligraphe. Toute sa vie il manifesta une grande bienveillance pour tous les êtres, et c’est pour cette raison qu’il est encore, de nos jours, si populaire au Japon.
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Kôbô Daishi - enfant
Il naquit en 774, au village de Byôbuga-ura, dans l’île de Shikoku. Sa famille était prospère, son père avait exercé le rôle de gouverneur de province. Il était le troisième enfant et reçut le prénom de Mao, qui signifie "Poisson de vérité". Très tôt il manifesta une remarquable intelligence, alors, il fut appelé Tôtomono, le "précieux". Déjà dans ses jeux, il montrait une profonde attirance pour la religion car il avait l’habitude de façonner des Bouddhas en argile pour ensuite les prier sur des petits autels. A l’âge de 15 ans, il se rendit à la capitale, Kyoto, auprès de son oncle, savant renommé, précepteur à la cour, pour étudier les belles lettres chinoises et les textes du Confucianisme. Inscrit au collège gouvernemental à 18 ans, il étudia assidûment durant deux ans ; devant ses brillants résultats la famille espérait qu’il deviendrait haut fonctionnaire à la capitale, mais le jeune Kûkaï s’intéressait plus au Bouddhisme qu’à sa carrière. Il étudiait également les textes anciens du Bouddhisme traditionnel de Nara. Comprenant la vanité de ses études laïques, il quitta le collège malgré la forte opposition de son entourage.
La fin du VIIIe siècle est marquée au Japon par de grands changements politiques. Le clan des Fujiwara prend le pouvoir et l’empereur Kanmu transfère la capitale de Nara à Kyoto. Ce renouvellement total augmente les charges qui pèsent sur le peuple qui souffre de la misère. De par sa nature profonde, Kûkaï avait senti que dans le Bouddhisme se trouvait la solution des problèmes essentiels de la vie des hommes. Il choisit donc de vivre en ascète errant, pour approfondir sa foi par la pratique religieuse. Il était le disciple d’un maître de temple, le prêtre Gonzô, qui l’initia au rituel de Goumonji, bien qu’il ne fut pas officiellement moine. Il pratiquait intensivement ce rituel et vivait tantôt dans des huttes au sommet des montagnes, tantôt dans des grottes au bord de l’océan. C’est ainsi qu’un jour, il vit l’étoile Vénus de l’aube descendre sur lui, et entrer dans sa bouche, lui apportant l’Illumination. A vingt quatre ans, il écrivit le "Sangô Shiiki", la vérité finale des trois enseignements, y comparant les trois idéaux du Confucianisme, du Taoïsme et du Bouddhisme, pour conclure que ce dernier est plus profond et plus apte à sauver les êtres, puisqu’il résout les problèmes de fond de la vie humaine. Il répondait ainsi aux reproches de son entourage qui l’accusait de ne pas vouloir servir son pays, et dès lors il se consacra entièrement à l’étude de la Voie.
Malgré ses études dans les temples de Nara, il n’était pas encore satisfait. Un jour il fit un rêve, l’invitant à se rendre dans le temple de Kumédéra. Là, il découvrit un texte encore peu connu au Japon, le Daïnitchi-kyô. Comme il ne pouvait le comprendre, il décida d’aller en Chine pour y approfondir cet enseignement. De 24 à 31 ans, c’est-à-dire jusqu’à son départ en Chine, il n’existe pas de documents sur sa vie, mais il est très probable qu’il dût beaucoup étudier et se perfectionner en chinois.
En 804, à 31 ans, grâce à l’appui de sa famille, il reçut l’autorisation de partir en Chine avec un ambassadeur. Juste avant son départ il reçut officiellement l’ordination de moine et prit le nom de Kûkaï qui signifie "Océan de Vacuité". Un autre religieux célèbre dans l’histoire du Japon, Saïchô, partait en même temps que lui sur un autre bateau. Il avait déjà fondé au Hieizan, au nord de Kyoto, un monastère du Tendaï et débutait brillamment sous la protection de l’empereur Kanmu. Après plus d’un mois de voyage, difficile, dû aux tempêtes, l’ambassadeur et Kûkaï débarquèrent en chine, très loin de la capitale Chang’an. Sur les quatre bateaux de la flotille, seulement deux étaient arrivés et le leur était dans un état si misérable que les autorités les prirent pour des pirates. C’est seulement lorsqu’ils virent la magnifique calligraphie de Kûkaï qu’ils reconnurent leur erreur. Aucun pirate n’aurait pu écrire avec une telle noblesse. Ils traversèrent la Chine par voie de terre, pour enfin arriver à Chang’an, la ville internationale la plus cultivée et la plus prospère du monde à l’époque. La Chine des Tang était à son apogée et, commerçants, philosophes et religieux du monde entier se côtoyaient dans sa capitale. Kûkaï s’enrichit au contact de ce foisonnement d’idées et de cultures si différentes. Il se rendit célèbre à la cour de l’empereur pour la beauté de ses ses calligraphies. Elles sont devenues maintenant des Trésors Nationaux du japon, visita de nombreux temples et connut divers grands maîtres. Il apprit ainsi le sanscrit auprès d’un maître indien. Cependant sa rencontre la plus importante fut celle avec Keïka-Ajari, ( Hui-go) le disciple de Fûkû-Sanzô (Amoghavajra), le plus grand maître vénéré de l’ésotérisme chinois.
Dès la première rencontre en mai 805, Keïka-Ajari reconnut Kûkaï :
"Je savais que vous viendriez. J’avais attendu si longtemps. Quel plaisir de vous voir ! mais hélas ma vie se termine et je ne sais si j’aurais le temps de vous transmettre mon enseignement."
Keïka-Ajari l’initia aux cérémonies de consécration "Kanjô" durant lesquelles le disciple, les yeux bandés, doit découvrir avec quelle divinité il a la plus grande affinité. A cette occasion, la fleur que lança Kûkaï sur un mandala (diagramme symbolisant l’univers) tomba deux fois de suite au milieu, à l’emplacement du Bouddha principal (Daïnitchi-Nyorai). C’est ainsi qu’il reçut le titre de Henjô-Kongô (le diamant qui illumine tout). En quelques mois, il reçut tous les enseignements de Keïka-Ajari comme on verse l’eau d’un vase à l’autre. Le Maître fit alors préparer activement à son intention les mandalas et les objets nécessaires à la pratique des rituels et de nombreux textes sacrés furent recopiés. Après cette période de transmission intensive, le Maître mourut à la fin de l’année. Kûkaï était son dernier disciple et il était, parmi tous, celui qui avait reçu les enseignements les plus complets directement de Keïka-Ajari. C’est sans doute pour cette raison qu’on le désigna pour écrire son épitaphe.
L’année suivante, il se joignit au nouvel ambassadeur pour retourner au Japon en Août 806. Jusqu’à la fin de son séjour, il recopia et rassembla des documents dans les divers domaines de la culture chinoise. Dès son arrivée, il envoya à l’empereur la liste des nombreux objets et documents qu’il rapportait de Chine. Grâce à sa longue préparation effectuée au Japon, il avait pu assimiler très rapidement non seulement les enseignements bouddhiques, mais aussi d’amples connaissances de culture générale, en lettres, calligraphie, médecine, travaux d’art, architecture, etc...
Cependant il était parti en Chine avec une délégation officielle et il avait été convenu qu’il devait y rester 20 ans. Son retour prématuré embarrassa les autorités. Il dut demeurer environ quatre ans au Temple de Kanzéonji dans l’île de Kyûshû, au sud du Japon, avant de recevoir l’autorisation de rejoindre la capitale.
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Kôbô Daïshi est célèbre pour ses calligraphies.
Namo daîshi Henjo Kongo !

dimanche 17 janvier 2010

Aoki senseï





Mon maître dans le dharma

Vénérable AOKI YUKÔ
Le vénérable Aoki Yukô, fut un des plus grands maîtres du shingon contemporain et  un des rares qui reçut de l'empereur, le titre de Trésor National Vivant du Japon. Il a disparu en Mai 1985 à l'âge de 94 ans.
Il fut secrétaire général du grand temple école, de Hassédéra, et pendant 25 années, il y forma de nombreux maîtres et moines du Shingon et ainsi il prodigua son enseignement jusqu'à sa mort.
Sa notoriété s'étendait à tout le Japon. Selon la tradition millénaire instaurée par Kobo-Daishi, il a dirigé neuf fois les grandes cérémonies du Mishuho qui ont lieu au temple du Tôji à Kyoto. Là, les principaux grands maîtres du bouddhisme shingon se réunissent chaque année, pour prier et apporter le bonheur et la protection au pays.
Aoki-Senseï, résumait ainsi l'essence de la spiritualité japonaise.
"Nous ne vivons pas seuls, disait-il, mais grâce aux autres, notre vie est un don précieux qu'ils nous font. Aussi devons-nous cultiver un sentiment de respect et de reconnaissance non seulement vis-à-vis des personnes vivantes ou décédées à qui nous devons d'être là, mais encore pour chaque objet que nous utilisons, l'aboutissement de tant d'efforts. La vie est partout et dans chaque chose".

mercredi 13 janvier 2010

bouddhisme et shintoisme - Wako jinja



Certains parmi vous le savent, en 2006 Komyo In était le premier temple français a recevoir un jinja (autel) shintoiste d'un grand temple du japon Mizuya Jinja. A cette occasion, ce texte avait été écrit pour expliciter la portée de cet évènement

Les japonais sont davantage attentifs à la qualité de leur ressenti intérieur au niveau du cœur, le "kimochi" plutôt qu'aux théories ou aux dogmes, aussi ils peuvent faire coexister plusieurs approches sans conflit dans leur vie spirituelle. Un dicton dit que "les Japonais naissent shintoïstes, ils peuvent éventuellement appartenir à une autre religion durant leur vie mais à la fin ils deviennent pourtant tous bouddhistes". Depuis des siècles, le Bouddhisme et le Shintoïsme participent ensemble harmonieusement à la vie spirituelle des japonais pour leur bonheur. Classiquement on dit que le shintoïsme s'occuperait plutôt de la vie ici-bas alors que les prières des moines bouddhistes assureraient le salut des âmes après la mort. Mais ce n'est pas si simple parce que beaucoup de temples en particulier dans le Bouddhisme Shingon ont pour vocation d'apporter par leurs rituels un mieux être dans la vie quotidienne. Autrefois le Bouddhisme a fortement influencé le Shintoïsme tant au niveau de son architecture que de ses divinités dont certaines appartiennent maintenant aux deux religions comme « Inari » dans le shintoïsme qui est appelé dans le bouddhisme « Dakini-ten» , ou encore le dieu protecteur Daïkokou (mahakala) qui est prié aussi dans les temples shintoïstes de Kasuga-jinja ou de Miwa. De nombreux temples bouddhistes au Japon possèdent sur leur terrain un petit temple shintoïste dont la divinité est rattachée au Bouddhisme qui la considère soit comme la représentation des divinités de la région, gardiennes des lieux, soit comme une manifestation concrète d'un des Bouddhas du vaste panthéon bouddhique.
Le Bouddhisme Shingon, auquel se rattache Kômyô-in, a beaucoup de points communs avec le Shintoïsme car il considère que la vie de la nature et de tout les êtres sont les différents aspects de la manifestation d'une même source, le Bouddha appelé Grand soleil, Daïnitchi nyoraï. Les shintoïstes sont polythéistes, pour eux la variété de la vie de la nature est l'expression d'un nombre infini de divinités qui expriment leurs points de vue différents. Ces deux religions ont en commun leur amour et le respect de la vie comme l'expression d'une réalité qui dépasse l'entendement humain.

Le Shintoïsme
L'homme appartient à la grande force de la vie de la nature qui lui donne sa santé et oriente son destin. Le shintoïsme est la voie des Dieux, il s'agit de retrouver en soi l'harmonie en rendant un culte aux divinités de la nature. Les objets de culte sont variés et d'origine naturelle, ils sont considérés comme sacrés car habités par des forces archaïques et sont alors entourés alors d'une corde en paille de riz tressé, le « Shiménawa » dans lequel sont insérés des papiers découpés. De même le caractère sacré d'un lieu est signifié par l'installation
d'un portique appelé, « Torii » qui signifie que l'on entre dans le domaine d'un dieu. Épée mythique, rochers, montagnes sacrées, cours d'eau, vieux arbres millénaires, pierres aux formes magiques et parfois, même de simples objets d'usage courant comme des aiguilles ou des outils peuvent faire l'objet d'un culte ou d'une cérémonie. En toutes circonstances, il convient donc de traiter les objets avec respect car ils peuvent être considérés comme l'émanation ou la représentation concrète d'une force issue du monde des Dieux du ciel ou de la terre, les "Kamis"qu'il convient de ne pas offenser. Pendant le culte sont offerts le riz, les fruits ou les légumes cultivés par les hommes et même le saké, la boisson des Dieux. Les offrandes acceptées assureront le lien entre le monde visible des hommes et le monde invisible des Dieux et la succession des saisons se
fera de manière favorable pour que la nature assure la continuité de la vie. Le shintoïsme divinise le quotidien, retrouver la pureté et l'harmonie est particulièrement important au commencement d'une période de temps ou d'une entreprise pour écarter les obstacles et attirer les bonnes grâces des Dieux. Par exemple un prêtre viendra purifier les lieux au début de la construction d'une maison et une fois le travail fini, une autre cérémonie sera effectuée pour les remercier. De même au début de l'année les Japonais vont en nombre prier dans les temples bouddhistes et shintoïstes appelés "Jinja" pour voir exaucer leurs vœux et que la nouvelle année se passe bien. De nombreuses usines ou entreprises ont à l'entrée de leur domaine un autel shintoïste censé les protéger des mauvaises influences. Fréquemment des petits autels sont installés dans les bureaux ou chez les commerçants et même des talismans dans les trains. Quel que soient les circonstances, il s'agit toujours de purifier le cœur de l'homme, les objets ou les lieux pour retrouver le lien avec la nature et le monde spirituel.

Le bouddhisme chemin de paix

(emission voix bouddhistes)

Le Bouddhisme est la voie qui enseigne comment atteindre la paix de l'esprit par le respect de l'éthique et le renoncement aux passions.
Plus nous sommes attentifs à ne pas blesser les autres êtres, en pensées, en paroles et en actes plus nous vivons en harmonie avec notre environnement qui en retour nous inspire positivement.
Plus nous cultivons le contentement pour nous simplifier la vie, plus nous favorisons le recueillement qui apporte le calme intérieur nécessaire pour mener une vie juste.
Par la méditation, nous prenons l'habitude d'observer notre esprit de manière détachée et nous connaissons mieux ce qui nous fait réagir aux circonstances.
Il devient alors plus facile de se libérer de toutes les illusions mentales qui sont la source des désirs, ou des conflits.
Apaiser son esprit et se comprendre soi-même permet de mieux comprendre les autres et de leur pardonner parce que l'on devine que derrière la méchanceté, il y a beaucoup d'immaturité et de la souffrance.
Être bouddhiste c'est méditer sur les trois joyaux.
Méditer signifie se rendre disponible en calmant son esprit pour recevoir une influence spirituelle qui éveille des qualités de sagesse.
Lorsque nous prenons refuge dans les trois joyaux , nous nous connectons sur l'esprit du Bouddha qui descends dans le cœur sous forme de lumière. Il le purifie et agrandit son rayonnement pour que s' éveille la vision intérieure qui donne une autre compréhension du monde.
Cette méditation est comme une respiration qui fait circuler l'énergie vitale en soi laquelle a tendance à se bloquer quand il y a un choc émotionnel, Aussi pratiquer la méditation est un bon moyen pour préserver sa santé.
Dans un conflit, prendre le temps de respirer profondément plusieurs fois ou quelques minutes permet d'évacuer le surplus d'émotion pour réfléchir à la solution la plus juste pour soi et pour l'autre. Parfois il faut savoir se donner le temps d'une nuit de sommeil avant de réagir.
Être agressif et destructeur est un signe certain d'immaturité qui n'apporte que de la souffrance.
Le Bouddha a dit:" Si la haine répond à la haine, comment la haine finira-t-elle?"
Il s'agit de couper la réaction en chaine des mots blessants qui en entrainent d'autres et la respiration-méditation apporte une aide considérable.
Cette pause respiratoire permet de gagner en maturité et de se faire respecter parce que l'autre aussi à le temps de réfléchir à ce qu'il vient de dire.
Cependant il existe des gens particulièrement difficiles à supporter qu'il vaut mieux éviter si c'est possible, c'est parfois la seule façon de se préserver.
Être bouddhiste, c'est cultiver la bonté et la non violence, cela signifie que pour nous le plus important n'est pas de s'affirmer, de gagner dans une polémique mais de préserver la pureté et la noblesse de notre cœur parce que c'est par son intermédiaire que nous communiquons avec le Bouddha pour changer le monde. Si notre cœur se ferme nous sommes comme des enfants perdus.
Face à l'adversité, c'est par notre exemple que nous pouvons édifier les autres et nos adversaires peuvent devenir plus tard nos plus grands amis.
Le bouddhisme est également une école de tolérance parce que nous savons qu'il n'y a pas une vérité unique ni une seule voie de salut mais beaucoup de manières possibles de conceptualiser le monde.
Chaque système de pensée est adapté selon la maturité des consciences.
Dans le bouddhisme tout est de la nature de l'esprit, tout concept est vide d'existence intrinsèque.
Il n'y a pas un dieu créateur, mais le bouddhisme accepte toutes les religions comme des moyens valides de développer ses valeurs essentielles la compassion et la sagesse. D'ailleurs tous les grands saints tiennent a peu près le même discours, Dieu est amour, joie, lumière indicible, inconcevable.
Être bouddhiste n'est pas facile dans ce monde où les médias flattent et justifient la facilité d'une attitude paresseuse et irresponsable en tournant en dérision ceux qui font de grands efforts pour s'améliorer. Il est évident que nous ne sommes pas parfaits. Les critiques sont donc les bienvenues pour que nous en soyons bien conscients et restions vigilants. L'important, c'est de garder toujours l'humilité, le cœur de débutant et conserver ainsi de la disponibilité pour s'améliorer.
Beaucoup de gens considèrent l'attitude altruiste comme utopiste dans ce monde matérialiste.
Être bouddhiste, ce n'est pas être un doux rêveur irresponsable.
Par l'ascèse et la prière nous nous appuyons sur la force du Dharma qui éveille dans le cœur des hommes les bonnes volontés.
La prière purifie le karma, éloigne les obstacles, apaise les disputes, donne les bonnes inspirations et favorise les rencontres favorables (go-en) pour faire aboutir des projets positifs.
C'est ainsi que non seulement nous pouvons nous transformer mais aussi que nous pouvons servir le monde. Nous devons seulement être vigilant à ne pas vouloir forcer les choses par la prière. Ce qui doit se passer, arrivera au bon moment d'une manière inattendue si nous sommes suffisamment ouvert et persévérant. S'abandonner à le sagesse du Bouddha c'est éviter les tensions inutiles.
Les conflits et les guerres naissent de la saisie dualiste de l'esprit qui s'arrête aux différences apparentes entre les hommes. De l'incompréhension des cultures nait le mépris, le rejet, puis la haine.
Ce qui donne un sens à la vie et apporte le bonheur c'est de faire du bien. Quand approchera le jour de notre mort, nous penserons à ce que nous avons fait de mieux pour justifier notre vie.
Aurons-nous témoigner suffisamment d'amour de tendresse à notre famille ? pour qu'elle comprennent que l'important ne se voit pas, ne s'achète pas, qu'il est dans notre propre cœur quand il est rempli de compassion.
Aurons-nous fait de notre mieux pour que le monde devienne meilleur ? Si oui, alors nous pourrons mourir le cœur en paix, et ayant accumulé de bons actes nous aurons de bonnes chances d'avoir une renaissance heureuse.
La vie n'est pas un combat des forces du bien contre les forces du mal mais contre l'ignorance.
Pour nous bouddhiste notre seul ennemi, c'est notre propre ignorance qui cristallise notre ego qui réagit vis à vis des phénomènes de ce monde avec avidité ou colère.
Le Bouddha n'est pas situé dans un paradis lointain, il est dans l'ici et le maintenant à l'œuvre constamment derrière chaque phénomène. Il faut traiter chaque chose et chaque être avec beaucoup de respect comme ses représentants.
Celui qui sait lâcher-prise vis à vis de ses idées bien arrêtées et accepte le dialogue découvre avec stupeur combien les autres sont non pas des rivaux mais des compléments essentiels pour combler ses insuffisances.
Pour cela il faut être sincère, développer l'humilité et être attentif à reconnaître la présence du Bouddha dans ses interlocuteurs.
Tout peut se résumer ainsi :
"Le monde est un, tout est le BouddhaDaïnitchi-nyôraï."
Yukai sensei

La pratique du renoncement

Celui qui veut approfondir l'exploration de la conscience et servir de manière efficace l'humanité doit renoncer à tout ce qui est superflu et contraignant au niveau affectif. Concentrer à l'intérieur les forces de l'esprit qui veulent se projeter sur des objets à l'extérieur, c'est suivre la voie des moines qui renoncent au monde.
La société valorise les hommes forts, courageux ou intelligents qui savent s'imposer dans le monde; mais dans la religion la vraie force intérieure consiste à ne pas réagir de manière négative quels que soient les aléas de la vie ou les fluctuations de l'esprit.
La priorité pour un religieux est toujours de garder un esprit calme et serein qui peut rayonner de l'amour, sans vouloir changer le monde par la force, reniant ainsi ses principes de bonté et de non violence.
C'est pourquoi la religion n'a rien à faire avec la politique, l'une s'occupe des causes profondes karmiques et l'autre des problèmes concrets sur le court terme dans un pays.
La vie des religieux est souvent faite de déceptions ou de tentations, de trahisons, de calomnies ou d'insultes, elle est jalonnée d'épreuves diverses pour leur apprendre à lâcher prise au niveau de la personnalité.
Ce n'est que lorsqu'on est complètement mort à sa vanité personnelle que l'on peut accéder à des niveaux de conscience profonds où la puissance de la prière devient effective.
Ce n'est que dans la tranquillité de la solitude et avec la force de l'ascèse que la méditation intensive peut s'approfondir.
Faire une ascèse signifie renoncer à certains plaisirs humains pour emmagasiner une force qui va stabiliser l'esprit.
Une ascèse doit être un effort personnel qui coute physiquement, comme renoncer à une nourriture qu'on aime bien ou manger très peu.
Cela peut être d'arrêter de prendre du café, de fumer ou encore accepter de vivre dans des conditions difficiles ou au froid, cela peut être aussi se laver à l'eau froide en hiver, marcher longtemps ou décider de ne pas prendre l'ascenseur pendant une longue période.
Ces petits sacrifices accumulés vont apporter une protection contre le mauvais karma. Il n'est ainsi pas rare au Japon de faire une ascèse pour se prémunir de désagréments futur. Cela renforcera aussi notre vigilance contre la partie animale de notre être qui vise a satisfaire ses propres besoins.
Même si c'est parfois dur pour le corps physique, les ascèses sont des moments de grands bonheurs où la vie intérieure se développe pleinement au contact des forces spirituelles. C'est comme escalader une montagne, il y a des risques, c'est dur mais après on ne voit plus la vie de la même façon et on est heureux.

Un proverbe dit:

"Rechercher les plaisirs du monde est agréable au début, désagréable à la fin.
Rechercher la voie du Bouddha est désagréable au début, très agréable à la fin"

Yukaï senseï
decembre 2009

lundi 11 janvier 2010

Maître Matsumoto Jitsudo - la pratique journalière


La pratique journalière
Habituellement, pour prier, nous récitons les sutras, et répétons les shingons, (mantras). Mais cela ne veut pas dire pour autant que nous avons vraiment assimilé le sens des textes sacrées. Evidemment, c'est par les sutras que les Bouddhas enseignent les vérités dans ce monde. Si on les récite ou les répète avec le coeur pur, même si on en comprend pas tout à fait le sens, ils deviennent une offrande aux Bouddhas. Nos prières sont alors exaucées et notre coeur s'en trouve purifié.
Selon la tradition, "les sutras doivent être lus avec les lèvres, avec le coeur et avec le corps". Lire à haute voix est la manière habituelle de les réciter, et par cette récitation nous nous purifions. Si nous sommes en proie au mécontentement et à l'insatisfaction, les pensées perturbées disparaitront pendant que nous récitons calmement les sutras devant le bouddha.
Malgrè nos soucis nous nous apercevrons que notre coeur s'est apaisé. C'est la la vertu de la récitation des sutras; elle purifie le coeur mécontent. C'est cela lire "lire les sutras avec le coeur". Si notre coeur ne se calme pas lors de la récitation des sutras, c'est que nous avons "tué" le sutra.
Une fois le coeur purifié, nous ne devons pas en rester là. Il faut passer à l'action. Lorsque nous nous sentons vraiment heureux et le coeur purifié, nous remercions le bouddha en aidant ceux qui sont malheureux. C'est "réciter, avec le corps". A ce stade nous avons une bonne pratique.
Autrement dit, le sutra s'ouvre par notre récitation du matin, continue par notre travail bien accompli dans la journée, et se termine par la récitation du soir.
Ainsi nous rendons vivante la récitation des sutras. La partie la plus importante du sutra s'exprime à travers notre activité de la journée. Se contenter de réciter les mantras et les sutras matin et soir serait insuffisant.
Maître Matsumoto Jitsudo
Avec le Bouddha
Ed. Guy Trédaniel

dimanche 10 janvier 2010

Temple du Hozanji




Situé sur les hauteurs du mont Ikoma à l'ouest de Nara le temple Hozanji est célèbre pour le culte secret qui y est effectué toutes les nuits à Kanguiten (Shoten sama) divinité bouddhiste représentant l'union d'un couple d' éléphants à forme anthropomorphique. L'un étant une transformation de Kannon, le bodhisattva de la compassion, et le second Ganesha, divinité importante bien connue dans l'hindouisme. Les fidèles se pressent au temple pour demander succès dans les affaires et harmonie dans leur relation de couple.
Une sculpture célèbre de Fudo Myoo faite par le maître Tankaï fondateur au 17 ème siècle du temple est aussi le lieu de départ d'un important pèlerinage le Yamatso Jusan Butsu (13 bouddhas)
Le temple Komyo-In ou se pratique les rituels de kanguiten entretient des liens étroits avec le temple du Hozan Ji

samedi 9 janvier 2010


Histoire d'une rencontre et début dans la pratique (suite & fin)

Qui aurait pu imaginer que, six ans plus tard, nous participerions non seulement à ces mêmes cérémonies mais encore que nous pourrions pratiquer de grandes ascèses comme celle, parmi les plus célèbres, de Kokouzo Goumonji ! Cette ascèse consiste à prier pendant cinquante jours Vénus, l'étoile de l'aube, considérée comme la manifestation du Bouddha Kokouzo (Skt. Akashagharbha), gardien des trésors du ciel, celui qui possède toutes les vertus, qui peut apporter la richesse et, don suprême, l'intelligence nécessaire pour comprendre tous les textes sacrés. Si l'ascèse est parfaitement suivie, l'étoile de l'aube apparaît le dernier jour au moine qui l'accomplit et celui-ci atteint l'illumination, c'est-à-dire devient «un avec l'Univers». Kobo Daishi, le fondateur du Shingon, y parvint. Selon la tradition, après avoir beaucoup pratiqué cette ascèse, il vit un jour l'étoile de l'aube fondre sur lui et entrer dans sa bouche. Dans un petit temple solitaire au sommet d'une montagne, complètement coupés du monde, nous avons prié l'étoile et les maîtres qui nous avaient précédés afin qu'ils nous soutiennent dans notre effort. Levés à trois heures et demie du matin, notre journée commençait par des ablutions purificatrices: dix-huit seaux d'eau glacée sur nos corps entièrement nus. Ensuite, au cours de deux rituels de sept ou huit heures chacun, nous répétions vingt mille fois par jour la même prière jusqu'à un million de fois pendant toute la durée de l'ascèse. Un seul repas au milieu de la journée devait nous suffire: une petite tasse de riz cuit à l'eau; quelques légumes ou des algues séchées; un peu de thé...

Ce n'est pas par masochisme que ces règles sont prescrites aux moines, mais pour favoriser le nettoyage de l'intérieur du corps et des canaux subtils qui le parcourent. Canaux qui existent aussi à la surface de la peau: c'est là que les acuponcteurs cherchent les points sensibles et plantent leurs aiguilles. Dès la première semaine, surgirent de mon passé mille images oubliées, libérant tensions et peines dans une sorte de psychanalyse accélérée. Finalement, ces cinquante jours passèrent très vite. Contrairement à ce qu'on aurait pu penser, nous n'étions pas exténués. La faim nous tortura surtout pendant la première et la dernière semaine. Il n'empêche que, à la descente, je pesais seize kilos de moins qu'à la montée. Et ma femme, douze. Quant à savoir si je suis devenu plus intelligent... je n'en ai pas le sentiment. Je ne crois pas, non plus, que ma mémoire se soit améliorée considérablement avec l'expérience. En revanche, mon intuition semble s'être aiguisée. Quoi qu'il en soit. les grands maîtres insistent surtout sur l'importance de la pratique dans la vie quotidienne. Vivre chaque jour avec sagesse, faire face avec patience aux tracas de l'existence. est en effet beaucoup plus difficile que toutes les ascèses.
Aoki Senseï vint enfin nous annoncer qu'il était prêt à nous ordonner moines et à nous initier au Shido Kegyo, les quatre rituels qui sont à la base de toutes les pratiques du Shingon. Pour mieux suivre son enseignement, il nous fallait loger près de son temple. Un moine nous trouva une chambre bon marché dans un immeuble en bois d'un quartier populaire. Nous vivions à la japonaise. de façon fort modeste: sans mobilier. ni chauffage. Mais les épreuves d'endurance font partie du travail spirituel... Pour la cérémonie de l'ordination, on nous rasa le crâne (à ma femme aussi). Un ami au grand coeur mais aux petites jambes me prêta son kolomo. Il m arrivait au genou... Ce qui m évitait de me prendre les pieds chaque fois que je me prosternais. Comme lorsque. par la suite. j'en eus un à ma taille! Ce jour-là nous reçûmes nos noms initiatiques: ma femme, celui de Yûsen. qui signifie «Pureté infinie»; moi, celui de Yûkaï, «Joie infinie».
Des quatre rituels d'initiation. consistant pour l'essentiel en prières et ascèses à l'adresse des différentes divinités, ce qui me frappa le plus ce fut l'ascèse du Goma, celle du feu. Les rituels de feu, que l'on retrouve dans toutes les traditions, sont très appréciés par les Japonais. On y prie Fudo Myôô (Skt Achalanatha), l'inébranlable, la forme irritée du Bouddha qui apporte la grande purification, en faisant brûler des morceaux de bois. Cent huit d'ordinaire, huit mille. ou plus, dans certains cas. Le Hassenmai Goma est l'une des ascèses les plus difficiles qu'il m'ait jamais été donné d'accomplir. Elle consiste à faire brûler un à un, dans le foyer d'un autel. huit mille morceaux de bois de la taille d'un crayon. Chacun des bâtonnets représente une passion du coeur de l'homme. et pour chacun il faut réciter une prière sans quitter des yeux le Bouddha qu'on imagine dans le feu. Je voulais par cette ascèse, intercéder auprès des divinités en faveur de la paix dans le monde. Une dame avait financé l'achat des morceaux de bois, à la condition que je prie également pour le succès de son fils aux examens.

Huit mille bâtonnets brûlés un par un

.......
Après une longue préparation par la prière, le jeûne et divers rituels, je commençai un jour l'ascèse à deux heures du matin. Aidé de quatre amis moines qui m'apportaient le bois et autres offrandes et répétaient sans cesse, eux aussi, des prières pour la paix, je passai près de douze heures à alimenter continuellement le foyer. Quand les flammes s'élevaient jusqu'à une hauteur de un mètre et que le feu me brûlait le visage et les mains, quand ma gorge se desséchait, mes amis aspergeaient d'eau les bords du foyer afin que l'humidité de la vapeur d'eau me soulage et me permette de continuer. Finalement, tout se passa bien. Le fils de ma bienfaitrice réussit son examen. L'état de la paix dans le monde, je le sais, reste précaire. Mais que cela n'empêche personne de prier pour son amélioration... D'une étape de mon initiation à l'autre, j'eus, une fois, l'occasion de participer avec des Shugendos (ascètes des montagnes) à une marche sur le feu, cérémonie censée être purificatrice mais qui rappelle beaucoup plus le chamanisme que le bouddhisme. Il s'agissait moins de s'ouvrir avec amour et humilité à la grâce des Bouddhas, comme avec le Goma, que de contrôler les forces de la nature à l'aide d'une puissance mystérieuse. D'un point de vue scientifique, la chose est inexplicable. Pourtant, ce jour-là, avec six cents autres personnes, j'ai bel et bien marché sur des braises ardentes sans me brûler... Autre ascèse particulièrement difficile, non plus de feu mais d'eau: celle des cascades. Ma femme et moi avons prié et accompli des rituels en restant plusieurs minutes sous la chute de cascades consacrées. L'eau purifie tout, en particulier les passions. Mais cette eau à cinq degrés, tombe de trois mètres de hauteur, il faut prendre garde qu'elle ne vous frappe pas directement sur la tête, ce qui pourrait être dangereux, mais uniquement sur la nuque et les épaules.
Le Shido Kegyo n'était pas l'aboutissement, mais le début seulement de notre vie spirituelle de moines Shingon, le premier pas vers d'autres initiations. Pour être prêts à recevoir le Kanjô, sorte de baptême par lequel le Maître transmet la sagesse du Bouddha à son disciple, trois ans de pratique intensive devaient s'écouler encore. Nous avons décidé de les passer en France. Mais je n'avais plus aucune envie d'exercer la médecine ce qui ne m'empêchait pas de soigner ici et là des malades qui me le demandaient. Après avoir reçu les premières initiations, je voulais surtout approfondir ma connaissance du Shingon. Nous vécûmes pendant deux ans à Brie (Deux-Sèvres), dans un ancien relais de chasse. Puis dans un restaurant abandonné de Saint-Félix-de-l'Héras, dans l'Hérault, qui allait devenir mon temple. Nous avons passé un an à remettre en état le bâtiment. Et l'heure était venue de retourner au Japon, auprès de notre maître, pour recevoir le Kanjô (Skt.Abishekha)
Ce jour-là, Aoki Senseï faisait office de Daï Acharya, de Grand Maître qui initie les futurs maîtres afin que ceux-ci puissent, à leur tour, initier de jeunes moines. Cette cérémonie devant rester secrète, le temple était fermé aux visiteurs. Tenu moi-même de respecter le secret, tout ce que je puis raconter ici c'est que le novice, les yeux bandés, est amené devant un autel où figurent toutes les représentations des Bouddhas du Shingon. A un moment, on lui demande de jeter une fleur, l'endroit où elle tombe décide du Bouddha avec lequel le jeune moine aura toute sa vie un lien étroit et qu'il devra prier plus que les autres. Mais si mon Maître m'avait ordonné moine, je n'étais pas encore confirmé par l'école du Buzan, qui dirige la branche du Shingon dont nous faisons partie. Avant d'être définitivement consacré, je devais davantage étudier les textes sacrés, passer un examen, suivi d'une thèse. Je décidai aussi d'effectuer le Pélerinage à Shikoku, celui qui prépare à la mort, et d'accomplir, enfin, l'ascèse de Taku Hatsu, de moine mendiant.

PLAN DE SHIKOKU



C'est à Shikoku, une île du sud du Japon, qu'est né, au VIII siècle, Kobo Daishi. Il allait souvent prier dans les quatre-vingt-huit temples principaux et vingt temples secondaires qui sont les étapes du pèlerinage. Situés le plus souvent au sommet des montagnes, ils forment une sorte d'immense chapelet où. chaque année, des millions de Japonais se rendent pour implorer leur guérison ou se préparer à la mort, dans l'espoir de renaître près du saint. Nous fîmes la route en moines pèlerins. marchant. priant et méditant sur plus de mille kilomètres à travers l'île. Un bon préambule du Taku Hatsu, l'ascèse du moine mendiant, la plus difficile pour moi. «gaijin». Le chapeau rond à large bord. les guêtres blanches. le bâton de pèlerin muni de six anneaux inspirent toujours le respect pour ceux qui les portent. Même à l'ombre des gratte-ciel d'un Tokyo hyper industrialisé, dans le métro ou au milieu de la cohue qui règne dans les rues de la ville. Mais rares sont les moines qui pratiquent encore aujourd'hui cette ascèse. Pour moi, elle fut pourtant l'une de mes expériences les plus gratifiantes et l'occasion de vérifier que le moine mendiant reçoit bien plus que de l'argent: il gagne en humilité et en tendresse pour le genre humain. objectif essentiel de nos pratiques. Je n'oublierai jamais le petit garçon qui mit un bonbon dans le bol noir de fer martelé qui me servait de sébile. Ni la tasse de thé et le gâteau que m'apporta un cordonnier alors que je chantais mes prières dans le froid de l'hiver Ni ce vieil homme me disant: ' Koko itai, itai, gaijin san' « j'ai mal, j'ai mal ici étranger» en me montrant son côté afin que je prie pour que «ce pauvre corps de Bouddha» guérisse. Je n'oublierai pas, non plus, cette petite fille de six ans à peine donnant une pièce de dix yens à son frère, encore plus jeune qu'elle pour qu'il la dépose dans mon bol. Avec son geste empreint de tant de maturité, il y avait dans cette enfant plus de sagesse que chez bien des adultes. La dame riche de la boutique de soieries de luxe, par exemple, qui me fit une grimace et le geste de déguerpir.. c'est grâce aux milliers de piécettes ramassées en plusieurs mois dans les rues de Tokyo, d'Osaka. de Kyoto, que nous avons pu rapporter en France, le beau et grand Bouddha qui orne notre temple de Saint-Félix. à l'orée du Larzac.
Docteur Daniel Billaud (Yûkaï Senseï)

Aoki Senseï est décédé en 1985, à l'age de 94 ans.

En 1989 le temple a déménagé du Larzac pour se fixer défininivement près d'Auxerre dans l'Yonne, sous le nom de Komyo-In (Temple de la lumière) 


Histoire d'une rencontre et débuts dans la pratique (1)


C'est sur la scène d'un théâtre parisien, aux Champs-Elysées, que j'ai rencontré, un soir d'octobre 1974, celui qui allait devenir mon Maître et m'initier au Shingon, la branche ésotérique du bouddhisme japonais. J'étais venu assister à une représentation donnée par un groupe de moines en tournée à travers le monde. Face au public, devant un autel carré recouvert d'objets rituels et de tasses dorées qui scintillaient sous les feux des projecteurs, un moine en «kolomo» (habit) couleur vieil or dirigeait une cérémonie bouddhique du «Sutra de la grande sagesse». Il paraissait assez âgé et de son visage émanait une force empreinte de noblesse, une sérénité qui inspiraient le plus grand respect. La dignité de son maintien et la grâce de ses gestes étaient, à ne pas s'y tromper, ceux d'un grand Maître du bouddhisme. Autour de lui, disposés en forme de U, une vingtaine de moines, jeunes pour la plupart, chantaient le Shomyo, la liturgie traditionnelle. Dès l'instant où je le vis, je ne pensai plus qu'à le rencontrer.
J'entrais, je le sentais, dans une étape nouvelle, décisive, d'un processus qui avait commencé en moi depuis bien longtemps. Lorsque, à peine adolescent, j'admirais déjà la maîtrise de mon professeur de judo et, à travers lui, un Japon que j'idéalisais. Ou quand, au fil des années, je constatais que ni les philosophies acquises à l'école ni, plus tard, les études de médecine, n'arrivaient à satisfaire mes besoins de connaissances ni à étancher ma soif de sagesse. J'étais croyant, mais ce qu'on m'avait enseigné du christianisme ne me paraissait répondre que de manière imparfaite aux besoins spirituels de l'homme moderne. Peu à peu je me suis tourné vers l'Orient, puis vers le bouddhisme, plus particulièrement celui pratiqué dans ce Japon que j'admirais depuis mon enfance. Mais si j'ai choisi le bouddhisme japonais, celui-ci, j'en conviens, m'a choisi aussi en faisant intervenir le destin au bon moment. Tout d'abord lorsque, encore étudiant, j'ai rencontré une charmante Japonaise que j' ai épousée. Ensuite, le jour où j'ai découvert un livre consacré au Shingon: le «Dainitchi Kyo », de Tajima Ryujun. Je connaissais, à l'époque, de nombreux textes philosophiques et spirituels sur les religions orientales. Mais cet ouvrage fut pour moi une révélation. Je sentais qu'il contenait un enseignement solide, transmis de génération en génération et, bien que très ancien, particulièrement adapté aux conditions de vie de l'homme moderne. Enfin, lors de la venue à Paris d'un groupe de moines Shingon de Tokyo.

A la fin du spectacle, accompagné de ma femme comme interprète, je me précipitai vers les coulisses pour recevoir la bénédiction du Maître: Aoki Senseï, considéré au Japon - je l'appris par la suite - comme un trésor national vivant. Il nous reçut avec affabilité. Et cette rencontre changea le cours de notre vie. Dès le lendemain, nous le suivîmes en Belgique où le groupe de moines devait donner une représentation. Je n'avais rien trouvé de mieux à lui offrir qu'une belle statue de la Sainte Vierge achetée dans une boutique de la place Saint-Sulpice! En la recevant, Aoki Senseï la consacra « Bouddha de compassion». Cette Vierge orne toujours son temple de Tokyo. Ses fidèles s'imaginent qu'il s'agit d'une forme du Bouddha Kannon, protecteur des enfants... Après ce premier contact, depuis le Japon, en quelques lettres, le Maître nous conduisit peu à peu vers le chemin qui mène à «l'éveil du coeur de compassion». Cet enseignement est l'essence de la spiritualité japonaise. Il le résume en peu de mots: la reconnaissance à l'égard des autres et de l'univers tout entier. «Nous ne vivons pas seuls, dit-il, mais grâce aux autres. Notre vie est un don précieux qu'ils nous font. Aussi devons-nous cultiver un sentiment de respect et de reconnaissance non seulement vis-à-vis des personnes vivantes ou décédées à qui nous devons d'être là, mais encore pour chaque objet que nous utilisons, l'aboutissement de tant d'efforts. La vie est partout et dans chaque chose... »A peine ce chemin entrevu, je n'eus d'autre souci que d'aller rejoindre le Maître. Deux mois après avoir passé ma thèse de médecine, nous partîmes, ma femme et moi, pour Tokyo, avec l'intention de devenir moines Shingon tous les deux.
Bien que la majorité des moines soient des hommes, les femmes peuvent, en effet, être ordonnées. Rien n'interdit non plus aux moines de se marier. Jadis, le célibat était la règle. Mais celle-ci fut abolie il y a une centaine d'années. Pour plusieurs raisons: parce que le mariage, a-t-on pensé alors, permet d'éviter les excès et les dissipations qu'entraîne parfois le célibat. Mais aussi parce que, dans cette communauté très traditionnelle, la femme s'occupe de la maison et fait office d'hôtesse pour recevoir les visiteurs. La résidence familiale du Maître se trouve d'ailleurs toujours à côté du temple. Si bien que, par la force des choses, celui-ci devient une sorte de patrimoine qui se transmet de père en fils. Aoki Senseï lui-même, qui a aujourd'hui 93 ans, est marié. Il nous reçut très courtoisement à dîner dans son temple de la banlieue de Tokyo. A notre grande surprise, voulant nous faire plaisir, sa famille nous avait préparé... un boeuf bourguignon! Végétarien strict depuis dix ans, je fis néanmoins honneur au plat inattendu, tellement j'étais heureux de l'accueil. Il nous invita à le rejoindre quelques jours plus tard au temple du Tôji, à Kyoto. là où tous les grands maîtres du Shingon se réunissent une fois par an, au début de l'année, pour la cérémonie du Mishuho, où ils prient « pour la sauvegarde et le bonheur du pays»... Plusieurs semaines après notre arrivée, nous étions toujours dans l'incertitude à propos des intentions d'Aoki Senseï de nous faire entrer ou non dans la communauté Shingon. Ainsi que de celles des autres moines. Je pratiquais, certes, la méditation depuis longtemps. Mais ils devaient se demander comment un Français pouvait comprendre quoi que ce soit au bouddhisme ésotérique. Ce peuple insulaire, fin et cultivé, n'accepte pas facilement les «gaijins», les étrangers. Pendant ce temps, nous rêvions de méditations et d'ascèses, de sons de cloches et de symbolismes inconnus. Car nous en savions assez pour entrevoir, mais pas assez pour tout comprendre. Nous assistions journellement à des rites et à des cérémonials qui nous impressionnaient fort par leur faste. Pour les moines Shingon, l'esthétique a une grande importance. Le beau a un effet spirituel sur les êtres: l'esprit devient ce sur quoi il se concentre. C'est pourquoi les temples sont magnifiquement décorés et les gestes des officiants empreints d'une grande harmonie. Parfums, sons, mouvements, objets rituels... tout dans le temple tend à la perfection afin que l'esprit, à son contact, se purifie. Nous n'étions même pas des novices.

mardi 5 janvier 2010

Toji le joyau du bouddhisme Shingon au Japon

de l'excellent site Buddhachannel

Video sur le bouddhisme shingon (buddhachannel)

Bonjour,

Vidéo de présentation du Bouddhisme Shingon réalisée par le site Buddhachannel

lundi 4 janvier 2010


Etre attentif à son environnement

Nous ne vivons pas seuls mais connectés par des liens invisibles aux autres êtres des différents mondes, nous avons donc intérêt à savoir nous protéger des influences négatives et à faire venir les positives.
Le plus important est de contrôler ce que nous pensons et de vivre dans la propreté en aménageant le lieu d’habitation pour créer autour de nous de la beauté et un cadre naturel. Plus nous serons en harmonie avec la vie et plus notre cœur sera en paix comme la surface d’un lac, il recevra d'autant mieux l'influence spirituelle des Bouddhas.
Avoir chez soi des plantes, des jolies pierres naturelles, des coquillages, du bois peut créer un lien qui peut se renforcer encore en se promenant régulièrement en forêt, au bord de la mer ou en montagne.
Les Chinois ont appelé cela le Fengshui mais le Japon a aussi une merveilleuse tradition dans l'aménagement de ses jardins et de ses parcs bouddhistes ou shintoïstes. Les Bouddhas ou les dieux « les kamis » qui sont invités à venir y vivre par les prières et les offrandes peuvent purifier le cœur de ceux qui par leur prière s'ouvrent avec foi et respect à leur influence. Il ne suffit pas d'assister passivement à une cérémonie, sans repentance et sans s'ouvrir au bouddha, le cœur orgueilleux restera fermé et la purification sera superficielle.
Cette relation entre le ciel et la terre est entretenue par les cérémonies qui utilisent des objets purs pour capter ce qui est perturbé dans le cœur des hommes.
Les objets ne sont pas suffisants par eux même pour purifier, c'est la force des prières, des mantras qui fait bouger les passions dans le cœur des hommes, dont l'énergie est ensuite transférée dans les objets en papier ou en bois de gomas
Dans le shintoïsme on utilisera des papiers blancs découpés régulièrement renouvelés et dans le bouddhisme des talismans valable un an qui seront brûlés au début de l'année suivante. Ce peut être aussi des bois qui seront brûlés pendant le goma ou du sable chargé ou des talismans qui seront mis dans le courant de l'eau d'une rivière.
Le principe est toujours de relancer l'énergie négative dans le grand cycle de l'univers.

Un temple sert à purifier les pensées négatives du pays pour le protéger et chaque jour il faut donc lui même le purifier des mauvaises pensées qu'il a capté en le nettoyant ainsi que les objets du culte avec de l'eau. Nettoyer un lieu avec un balai et de l'eau, n'enlève pas seulement de la poussière mais aussi les résidus des charges mentales du monde ce qui revient à effacer le karma qui va bientôt se manifester.
Dans les temples les religieux se lèvent de bonne heure et commencent à nettoyer les autels et à changer les offrandes. Puis ils aspergent d'eau le sol du temple et l'essuient avec des serpillières, ensuite ils balaient le terrain. Ils modifient légèrement la structure du terrain en passant le râteau sur le sable du jardin et effacent ainsi les pensées qui se sont posées dessus comme on essuie un tableau noir d'école. En agissant ainsi et en répétant leurs prières, ils purifient et renouvellent l'ambiance du lieu.
Si la force des prières ne brûle pas toutes les mauvaises pensées des fidèles, des forces hostiles peuvent passer les barrières mentales de protection du temple et suggérer des idées de rivalité pour créer des conflits.
Matsumoto jitsudo disait : "Un temple où les moines se disputent est un temple où les moines ne prient pas assez". Il n'y a rien de mieux que les rituels de feu pour écarter les conflits, Kôbô-Daïshi le fondateur du bouddhisme Shingon au Japon afin d'écarter une menace de guerre civile a fait de nombreux rituels de feu pour la protection du pays.
Dans certain temple du Tendaï, le religieux novice fait une ascèse de nettoyage des lieux pendant de nombreuses années comme ascèse pour sa propre purification. Comme je viens chaque hiver à Hôzanji, je cherche moi aussi avant le début de l'année un peu partout des choses que je peux nettoyer, c'est ma participation pour purifier le lieu et protéger tout ceux qui y vivent. Le grand protecteur de Hôzanji Foudô-myôô est appelé inébranlable parce qu'il brûle toutes les passions des fidèles et détruit les obstacles quelque soient leur origine.Yukaï senseï



Bonjour,

Une courte présentation, je pratique le bouddhisme Shingon depuis bientôt 30 ans.
C'est une voie qui m'a beaucoup apporté tout au long de ces années et ce blog ambitionne de la faire un peu connaitre et si possible apprécier à d'autres comme ce fut le cas pour moi.
Au Japon, au même titre que le Zen ou l'Amidisme, le bouddhisme Shingon fait partie intégrante du paysage religieux du pays. L'empereur et la famille impériale font appel à cette tradition pour des rituels de protection du pays et de la famille impériale qui ont lieu en tout début d'année.
De nombreux particuliers, on les estime à environ 12 millions, continuent de pratiquer cette école bouddhiste qui date du 8éme siècle, ce qui en fait une des plus ancienne existante au Japon.
En France, Yukaî Senseï, un moine français ainsi que sa femme japonaise, Yusen Senseï , avec un groupe de quelques amis ont  construit un grand temple pas très loin d'Auxerre dans l'Yonne.
Ce temple, le "Komyo-In" s'est spécialisé dans les prières pour la protection du pays, à travers un protecteur du Dharma qui au Japon s'appelle Fudo Myyo, j'aurai l'occasion d'y revenir
Nous ne sommes à l'heure actuelle pas très nombreux, la pratique est dure, les rituels commençant au temple vers deux heures du matin..
Mais c'est un choix qui a été fait par le fondateur du temple, Yukaï senseî, qui au Japon est reconnu comme un ascète accompli et dont les articles traduit en Japonais sont publiés par de grands temples comme le Hozanji.
Afin de remercier Yukaï et Yusen pour les années passées à leurs cotés à bénéficier de leurs conseils et aussi afin de faire connaitre cette tradition, des amis ont suggéré de créer un blog présentant régulièrement des écrits de Yukaï senseï ou des articles sur le Shingon. Ce blog est le fruit de cette demande.